Un changement de civilisation (2/20)
A. Une croissance synonyme d'élévation du niveau de vie... ou presque
* Qu'il s'agisse du « visage » de la Terre ou de la vie des Hommes, le monde a davantage changé au cours des deux derniers siècles que dans les 8 ou 9 millénaires qui ont précédé.
- Depuis 1800 environ, l'humanité est progressivement entrée dans une ère de « croissance », c'est-à-dire d'élévation de sa production (mesurée aujourd'hui par le PIB), d'enrichissement, ce qui dans la plupart des cas s'est traduit par une amélioration spectaculaire de la qualité de vie.
- Reconstituée par des historiens et des économistes, l'élévation du « niveau de vie » entre Neandertal et l'Egypte des Pharaons n'était que d'un rapport de 1 à 1,5 ; entre l'Egypte de Ramsès Ier et la France de Louis XIV, c'était du même ordre : 1 à 1,5. Par contre, l'écart est de 1 à 18 entre la France de Louis XIV et la France de 1990.
* La croissance économique récente a ainsi débouché sur :
- un allongement considérable de la durée de vie, lié à de meilleures conditions sanitaires et d'alimentation (même si de nouveaux problèmes sont apparus dans ces domaines) ;
- l'accès au savoir d'un grand nombre, l'approfondissement de la connaissance des milieux naturels et la poursuite des progrès scientifiques et techniques ;
- la réduction du « temps contraint » par le travail et les nécessités domestiques (la durée légale du travail en France est de 1607h/an à temps plein, alors que la durée réelle moyenne du travail ouvrier dépassait les 3500h/an au début du XIXème siècle, et ce pour un temps de vie bien plus court) ;
- la possibilité démultipliée de nous déplacer, de communiquer, d'accéder au loisir.
* Cependant, plusieurs questions se posent :
- Pourquoi cette croissance a-t-elle démarré « d'un seul coup » il y a près de 200 ans ?
- Pourquoi ne s'est-elle pas généralisée ? Elle ne s'est en effet pas répandue à l'ensemble des Hommes dans les mêmes proportions ou avec les mêmes effets, certaines populations paraissant à l'écart de ces modifications que nous vivons comme des « progrès » : leur environnement matériel reste modeste, leur situation demeure précaire sur des sujets perçus comme aussi fondamentaux que la santé, le logement ou l'éducation, et parfois elles restent figée dans une « survie » faite d'insécurité dans leur accès à l'eau et à la nourriture.
- Pourquoi, alors que la croissance semble s'inscrire dans le temps long, les sociétés concernées vivent-elles des situations très fluctuantes depuis le premier démarrage de la croissance économique, ainsi que des exclusions et des crises douloureuses ?